La Peste Noire

Vous connaissez bien sûr le sens d’adouber : toucher une pièce pour la remettre en place et non pour la jouer en prononçant les mots : « J’adoube ». Ce terme échiquéen, de même qu’« en passant », est utilisé en français par tous les joueurs du monde.

À ce sujet, connaissez-vous ce personnage, un des plus curieux de l’histoire de notre jeu, Joseph Henry Blackburne (1841-1924). Homme de caractère fort et changeant, passant de l’irritation à la dépression très facilement, acteur d’une série d’anecdotes qui lui valut le surnom de La Peste Noire ! Pour en avoir une idée, il suffit de dire que, après avoir perdu un match contre Steinitz, il se jeta par la fenêtre par désespoir d’avoir perdu. La bonne nouvelle était que l’on était au rez-de-chaussée, l’événement n’eut donc pas de conséquences funestes. Une autre anecdote afin d’évaluer l’autre extrémité de sa personnalité fantasque : au cours d’une simultanée donnée à l’Université de Cambridge, les étudiants pensèrent qu’il serait plus facile à battre en laissant une bouteille de whisky et un verre à chaque extrémité de la table. À la fin de la session, Blackburne avait bu les deux bouteilles et remporté tous les matchs en un temps record. Une autre anecdote, probablement apocryphe, raconte que dans une simultanée, concentré et nerveux, il boit le verre de whisky de l’un des participants. Après le match, il déclare que son adversaire lui ayant mangé un pion « en passant » et que, incidemment, il avait, lui, bu son whisky « en passant ». Toujours, il a soutenu la théorie selon laquelle boire du whisky améliorait la qualité de jeu parce que « l’alcool éclaircit l’esprit. » Fidèle à ses idées, toute sa vie, il a tenté de prouver cette théorie toutes les fois qu’il le pouvait par des cuites sévères, qui furent nombreuses durant ses 83 années de vie.

Voici la partie Zukertort – Blackburne « L’immortelle » Londres, 1883 où Blackburne ne s’était sans doute point assez éclairci l’esprit :

Après ce long détour par la Peste Noire, je reviens à ma question :

Quelle est l’origine du terme « J’adoube » : 1. de l’adoubement du chevalier, 2. du verbe « dauber» dénigrer, 3. du vieux français « adubler » signifiant  «  voir double » ?

De l’ancien français adouber lui-même venant de douber et probablement de l’ancien bas francique dubban, « frapper ». Le futur chevalier recevait lors de l’adoubement la « paumée » ou « collée », fort coup du plat de la main administré par le parrain sur la nuque.

Six bonnes réponses sur neuf. Trois tpgistes se sont fait avoir par  les origines farfelues, particulièrement pas adubler qui, si le verbe dauber existe, est une pure invention.