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Une partie fin de siècle

Le Monde illustré du 17 décembre 1887 (un clic pour l’article en grand format)

Le Monde illustré était un hebdomadaire français d’actualités, édité de 1857 à 1940 et de 1945 à 1956. Dans son édition du 17 décembre 1887, il publiait à titre posthume une partie de Charles Bavoux, président de la Société des échecs de Besançon, décédé quelques mois plus tôt. Partie par correspondance d’un tournoi organisé par Bavoux et La Stratégie, mensuel d’échecs fondé par Jean Pietri, édité de 1867 et 1940. La notation est encore descriptive dans cette fin du XIXe. C. 3 FD signifie : le N se rend sur la 3eme case de la colonne du B de la Q soit Nc3 ! Je vous laisse décoder les commentaires de S. Rosenthal¹, le spécialiste échecs de cette antique revue. Voici la partie en notation algébrique, analysée par Alexeï. Je rappelle que vous pouvez suivre la partie sur un échiquier en cliquant sur la notation.

D’autres parties de Charles Bavoux dans le Monde Illustré.

Le Monde illustré du 28 janvier 1888

Si j’évoque si souvent dans ces articles consacrés à notre Tpg, cette Société des Échecs de Besançon et son président, c’est qu’il existe un rapport de filiation direct. Quand, après l’interlude si meurtrier que fut la Grande Guerre, cette société se dissout, c’est bien ses anciens membres que rencontre à la Brasserie Granvelle M. Picard, ce Bisontin de fraîche date, et c’est avec eux qu’il fonde le Cercle d’Échecs de Besançon, La Tour Prends Garde. Parmi eux, Zani, qui devait être alors un vieux bonhomme, car il participait déjà à ce tournoi par correspondance qui débuta le 10 avril 1885. Organisé par Charles Bavoux, il dura deux ans et neuf mois. Le droit d’inscription était de 12 F (environ 36 €) et devait être envoyé à M. Bavoux, 21 rue Charles Nodier. L’histoire de notre club est donc plus que centenaire et remonte, sans doute, avant la Guerre de 70.

¹ Samuel Rosenthal, né en 1837 à Suwałki en Pologne alors dans l’Empire russe, était un Maître d’échecs et journaliste franco-polonais. Éditeur du journal d’échecs français La Stratégie, il publiait une multitude de rubriques dans différents journaux, entre autres de 1885 à 1902 celle du Monde Illustré et gagnait de quoi vivre en enseignant les échecs. Après Wilhelm Steinitz, il est sans doute celui qui réussit le mieux matériellement dans cette fin de XIXe siècle. Ces titres de gloire : il battut Adolf Anderssen et deux fois Wilhelm Steinitz. Il mourut le 12 septembre 1902 à Neuilly-sur-Seine.

La Dame folle de Corsinet

Quatre réflexions sur « La Dame folle de Corsinet »

    1. T.R dit :

      Belle technique de la part de JFC. La seule façon de sauver la partie. Il a su garder son sang froid. De toute manière, il n’avait rien a perdre. Bravo !
    1. Notre bon JFC, peut-être inexpérimenté en matière de dames folles, devrait savoir qu’elles sont en général plutôt collantes. De ce fait, au lieu de 1.Qc8+? qui aurait perdu si l’innocent petit poussin avait senti les intentions du madré renard tépégistes, il était plus précis de faire nulle immédiatement par 1.Qg5+ et si 1…Kh3 2.Qg4+ ou 1…Kf3 2.Qe3+
      1. Il y a l’attaque Janier, y aura t il dorénavant : "il lui a placé une corsinet ?" L’histoire le dira…
      1. Un grand merci pour cet article ! J’étudie en effet tous les thèmes tactiques de base pour le DAFFE 1er degré et je ne connaissais pas « la dame folle », ni « la tour folle » d’ailleurs.
        Cordialement
        Marc CASTELLI

Les Noirs partent les premiers

S’arrêter au milieu du gué

UNE RÉFLEXION SUR « S’ARRÊTER AU MILIEU DU GUÉ »

Roquer or not roquer

Le débutant aux échecs lit et entend beaucoup de choses : développer, contrôler le centre, roquer « pas trop tard », commencer par des ouvertures solides… Il faut beaucoup tester, se faire sa propre opinion, tester à nouveau… Après avoir tenté plusieurs fois la Winawer, la variante d’avance, la variante d’échange, la Rubinstein, je commence à jouer la Tarrasch. Voici la partie jouée en mai avec Evan, j’espère qu’elle peut intéresser les joueurs débutants qui ne connaissent pas la Française, faire une piqûre de rappel aux joueurs intermédiaires et faire sourire les plus expérimentés.

Roquer, coup de développement prudent, souvent en faveur de la sécurité du roi, mais…

Plus d’une tour dans son sac

Dans cette position, Michel retire son fou 25. Bb1 ?! Verrez-vous le coup élégant qu’il manqua ?

Perdre deux fois une partie

UNE RÉFLEXION SUR « PERDRE DEUX FOIS UNE PARTIE »

  1. En effet, comme Philippe le dit bien 12. cd4 Bd6 n’est pas très logique, le meilleur coup est Bb6, car si on voulait jouer Bd6, pourquoi ne pas jouer directement 7... Bd6 au lieu de Bc5. Donc, çà se joue, mais c’est moins bien.

Les noirs ou les blancs ?

Il est pour nous, aujourd’hui, une évidence, en nous installant devant l’échiquier, que les Blancs auront le trait. Et pourtant, cette convention est plus récente qu’on ne le croit. Reliquat peut-être de l’esprit chevaleresque d’antan, d’un Messieurs les Anglais, tirez les premiers  échiquéen. François-André Danican Philidor, dans l’édition originale (1749) de son célèbre traité Analyse du jeu des Échecs, cite un partie dans laquelle les Noirs se déplacent en premier :

Analyse du jeu des échecs de Philidor

Phillip Sergeant, dans son History of British Echecs rappelait qu’Alexander McDonnell (1798-1835), au cours du match qui l’opposa à Labourdonnais, préférait avoir les Noirs en tant que premier ou deuxième joueur. C’était une mode courante à cette époque, qui persista chez un grand nombre de joueurs. Dans l’Immortelle d’Adolf Anderssen contre Lionel Kieseritzky, le 21 juin 1851 à Londres, partie devenue célèbre pour les sacrifices audacieux (deux tours, un fou et une dame), Anderssen a les Noirs, mais joua en premier.

L’Exposition universelle de Londres attira plusieurs dizaines de milliers de visiteurs des pays étrangers. Le Britannique Howard Staunton, considéré comme le meilleur joueur de l’époque, souhaite affronter l’élite européenne. Plusieurs pays envoient leurs meilleurs joueurs et Anderssen représente l’Allemagne, un inconnu pour les Anglais. Mais, en demi-finale, en cinq parties, Anderssen élimine Staunton sur le score de 4 à 1. Une défaite que Staunton, homme sombre et orgueilleux n’apprécia guère, mais qui assoit définitivement la réputation d’Anderssen comme l’un des meilleurs joueurs de l’époque.

Anderssen-Kieseritzky
Adolf Anderssen et Lionel Kieseritzky

Cette partie inspira et ravit d'innombrables joueurs d'échecs. Considérée comme typique de l'ère romantique dans laquelle les joueurs aimaient sacrifier du matériel allègrement pour s'approcher rapidement du roi ennemi. Anderssen débuta également avec les Noirs dans trois de ses parties (6e, 8e et 10e) contre Paul Morphy lors du fameux match de 1858 à Paris, jouant 1.a3 e5 2.c4, une défense sicilienne avec un tempo supplémentaire.

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, la pratique des Blancs jouant en premier n’était pas encore devenue une norme. George Walker dans son traité populaire The Art of Chess-Play, A New Treatise on the Game of Chess (1846), énonce les règles du London’s St. George’s Chess Club : le joueur qui joue en premier a le choix de la couleur ; si les joueurs jouent plusieurs parties dans la même séance, le trait changera à chaque partie, mais chaque joueur continuera à utiliser la même couleur qu’il avait à la première partie. Staunton observe encore en 1871 que « beaucoup de joueurs cultivent toujours l’habitude idiote de jouer exclusivement avec la même couleur. »

En 1880, la règle 9 du Tournoi de New-York spécifie : "À chaque ronde, le joueur aura le trait alternativement ; à la première partie, les blancs seront déterminés par tirage au sort et joueront en premier. Dans tous les cas, le joueur ayant le trait jouera les Blancs."

Trois ans plus tard, le Revised International Chess Code, publié au tournoi de Londres en 1883, dans sa règle 2 "Before the beginning of the first game the first move and choice of colour are determined by lot. The first move changes alternately in match play", prévoyait encore que le joueur ayant remporté le tirage au sort le droit de jouer en premier pouvait également choisir sa couleur. En 1889, Wilhelm Steinitz écrit dans The Modern Chess Instructor que "dans tous les matches et tournois internationaux et publics [...] il est de règle que le premier joueur soit les Blancs". Emanuel Lasker se sent encore obligé d'affirmer dans son Manuel, publié pour la première fois en 1927, que "les Blancs jouent le premier coup."

À vaincre sans péril…

... ON TRIOMPHE SANS GLOIRE 1-0 !

Boxeur teigneux


* La partie de Philippe contre Nicolas sera postée dans quelques jours.