Pour son premier voyage au pays des Échecs, suivant les traces de Iossif Dorfman, il vous guide hors des sentiers battus et rebattus des Échecs sur le difficile chemin de l’évaluation d’une position. Pour visionner cette première vidéo d’un série de trois sur le même thème : .
« Il est essentiel avant toute autre étude échiquéenne de savoir estimer correctement une position. Il ne sert à rien, en effet, de calculer une séquence de coups pour aboutir à une position que l’on estime gagnante alors que ce n’est pas le cas. »
Pierre Meinsohn, Les Secrets des maîtres d’échecs
LA POSITION CRITIQUE est une position où l’on a la possibilité de transformer, de modifier la position selon un de ces critères :
- Position dans laquelle il faut se décider pour un possible échange. Si l’échange est obligatoire, forcé, ce n’est pas une position critique.
- Position où il faut se décider pour une possible modification de la structure de pion, surtout des pions centraux.
- La fin d’une série de coups forcés.
Après avoir déterminé la position critique, il est nécessaire de dresser un bilan de la position selon ces deux aspects pour savoir s’il faudra utiliser des moyens statiques ou dynamiques dans la suite du jeu :
- L’ASPECT STATIQUE : ce sont les facteurs de longue durée (roque détruit, pions doublés, isolés, une pièce est statiquement mauvaise s’il n’est pas possible d’améliorer sa position indépendamment des pièces et pions adverses). Si la position est favorable statiquement, on obtiendra le gain à long terme donc il ne faut pas basculer la position, mais conserver globalement ces facteurs en améliorant progressivement sa situation.
- L’ASPECT DYNAMIQUE : ce sont les facteurs provisoires (Roi non roqué, modification du rapport matériel, prise de l’initiative, modification de la structure de pion) qui vont disparaître rapidement si on ne les utilise pas aussitôt et il faut, dans ce cas, basculer la position. Si pour un des joueurs le bilan statique est négatif, il doit appliquer sans hésitation des moyens dynamiques extrêmes. L’attente est telle une mort.
Dorfman propose de classer les facteurs statiques dans l’ordre d’importance suivante :
- La position du Roi : faiblesse irréparable de sa position (pas d’abri sur l’échiquier possible, mais si le Roi reste au centre, cela ne signifie rien s’il peut trouver un abri sûr), Roi mal protégé, armature du roque affaibli, attaque sur le roi.
- Le rapport matériel des forces, vu essentiellement sous l’angle du Fou : un Fou est généralement supérieur au Cavalier, deux Fous supérieurs aux deux Cavaliers, le tandem Tour-Fou coopèrent mieux que Tour-Cavalier, par contre l’association Dame-Cavalier est supérieure au binôme Dame-Fou. Par conséquence, l’échange du Fou contre le Cavalier n’est pas de mise dans la première phase du jeu et doit être envisagé uniquement quand la structure de pions est fixée.
- Qui a une meilleure position après l’échange des Dames ? À qui profite cet échange ? Qui aura une meilleure finale. Une position statiquement faible du Roi ennemi exige le passage en finale.
- La structure de pions : évaluer la position en fonction de la présence ou non de pions doublés ou triplés, d’un pion passé protégé, du nombre d’îlots de pions, d’une chaîne de pions compacte, des pions pendants, davantage de pions au centre, d’une majorité de pions à l’aile Dame, de cases faibles, de pions isolés ou arriérés.
Juste un mot à propos de l’évaluation d’une position aux échecs. Chaque joueur évalue la position tout au long d’une partie a son niveau. Autrement dit, la qualité de l’évaluation suppose l’ensemble des connaissances échiquéenne dans tous les secteurs par conséquent pourquoi ne pas aborder le problème dans le sens inverse qui consiste à améliorer ces connaissances et avoir plus d’outils pour évaluer. Aussi, on peut très bien évaluer une position à un moment donné pourquoi pas, mais dans une partie, il y a des centaines de position et la position qu’on appelle critique est le résultat des positions précédentes. En fait, l’évaluation est la synthèse des connaissances de chacun et chacune a son niveau.
Le propos de Dorfman n’est pas de nous dire qu’il ne faut pas à chaque instant réfléchir sur la position. Sa méthode est un guide pour ne pas passer à côté de ces moments clé où la partie peut basculer et où notre réflexion doit s’approfondir et, bien évidemment, dans la limite de notre savoir échiquéen. C’est bien le projet de Quentin, au travers des exemples choisis, de nous donner les outils pour affiner notre jugement.