La joueuse d’Échecs

par Bertina Henrichs

Un jeu peut-il faire basculer la vie d’une femme ? Difficile de le croire. Dans l’île de Naxos, les joueurs de trictrac sont légion, mais jamais aucune femme n’a approché les pions noirs et blancs. Quant à ceux d’un échiquier, n’y pensez même pas ! Cependant, pour Eleni, prise dans une vie sans aspérités et sans folie, le plus vieux jeu du monde sera le début d’une aventure qui la mènera jusqu’à l’émancipation.

Extrait : « C’était le début de l’été. Comme tous les jours, Eleni gravit la petite colline qui séparait l’hôtel Dionysos du centre de la ville à l’heure où le soleil apparaissait à l’horizon. La colline, terrain vague sablonneux et cre­vassé, offrait une vue exceptionnelle sur la Méditerranée et la porte du temple d’Apollon. Ce vestige de l’Antiquité, trop grandiose dans sa conception peut-être, était resté inachevé. Ainsi sa gigantesque porte, au sommet d’une presqu’île minuscule rattachée à Naxos, s’ouvrait simplement sur la mer et le ciel. Le soir, à défaut d’offrir un gîte à Apollon, elle accueillait, dieu pour dieu, le soleil couchant, adulé par les voyageurs éblouis. Apollon, plus discret dans ses manifestations terrestres, n’aurait sans doute appelé que quelques rares initiés. L’imperfection du temple n’était donc pas à déplorer, mais conférait au contraire un étrange mystère à cette terre sévère posée sur la mer Egée.

Eleni n’eut pas un regard pour le spectacle qui se jouait dans son dos. Elle le connaissait trop bien. Toute sa vie avait été rythmée par ce théâtre gratuit; ses spectateurs changeants, flux incessant de nomades, venant de loin, repartant au loin.

Ce matin, la colline était particulièrement silencieuse. Le vent, qui s’était levé durant la nuit, soufflait fort et couvrait les petits sons matinaux provenant de la ville. Eleni n’entendait que le crissement des cailloux sous ses pas et le halètement d’un chien errant reniflant ici et là, dans l’espoir de dénicher son petit-déjeuner. Le butin était maigre et il arbora un air boudeur, qui fit sourire Eleni. Elle se promit de lui apporter un bout de pain qu’elle prendrait dans les restes des repas de l’hôtel. »

Editions Pocket  2004 / Ref : LIT-HEN
Présentation : Poche – 17,8 x 11,1 cm – 672 pages
Mots-clés : roman, littérature

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