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Le Quiz

Dans cette enluminure, extraite du magnifique manuscrit Le Codex Wilehalm
de Wolfram von Eschenbach datant de 1334, un des personnages tient une pièce dans sa main.

Codex Wilehalm de Wolfram von Eschenbach, 1334University Library Kassel.

Est-ce une Tour, un Fou ou un Roi ?

5 bonnes réponses sur 17 ! 7 pour le Roi et égalité pour la Tour et le Fou. Vous ne vous êtes pas souvenus de ce précédent quiz sur le rukh persan : c’est bien un Tour, le chariot des origines indiennes, que tient dans sa main ce personnage. Bien que, à l’époque de ce manuscrit, c’était encore le roc (rochus en latin). Remarquez comme ces deux pointes profilées en arc de cercle du rukh arabo-persan évoquent les créneaux d’une fortification et donneront naissance à notre Tour un siècle plus tard.

Les pièces telles qu’elles n’ont sont arrivées d’Orient : le roi (ou la reine), la tour, le fou, le cavalier et un pion.

Ce style perdura pendant plusieurs siècles, remplacé peu à peu par des figurines retrouvant leurs racines indiennes figuratives. Le Roi (shah) et la Reine (firzan) ont une forme identique, interprétée comme un personnage installé sur un trône ou sur un palanquin sur le dos d’un éléphant. La reine est plus petite que le roi. La Tour (rukh), rectangulaire, est généralement deux fois plus large que longue avec une entaille profonde en V, créant deux cornes latérales. Le Fou (fil) est un éléphant, où seulement subsistent les défenses, suggérées par deux protubérances sommitales. Le Cavalier (faras), comme dans nos échecs modernes, est un cheval, stylisé par une seule excroissance pour la tête. Le pion (baidaq) a une forme conique plus ou moins arrondie.

La Tpg se déconfine !

Le bonnet rouge n’est pas compris dans l’offre.

Soucieuse de vous permettre un déconfinement tout en élégance, la Tpg vous propose sa nouvelle collection estivale. Cet après-midi, le top-modèle bien connu, Jean Le Floch, en a présenté cette déclinaison bretonne.

Malgré les efforts de Jean pour habiller notre déconfinement de couleurs glamours, nous devrons encore patienter avant de retrouver nos « têtes à têtes » échiquéens. Dans cette 2e phase qui débutera le 2 juin, le Gouvernement a donné son accord à la réouverture des équipements sportifs de plein air, mais aussi ceux couverts dans toutes les zones vertes. La pratique sportive devra respecter strictement les consignes sanitaires en vigueur et pour ce qui nous concerne :

  • pas de rassemblement de plus de 10 personnes dans l’espace public (pas d’échecs au parc, de tournois pour l’instant),
  • respect de la distanciation physique (5 mètres minimum),
  • pas de contact entre les pratiquants (à moins d’inventer une variante où l’on ne se prend plus les pièces ?).

Donc rendez-vous en septembre !

Distanciation sociale

Gilbert Jonet

Je reçois, ce soir, ce bien triste message de Jean-Louis Loux, président du Roi Blanc Montbéliard.

« Bonjour,
J’ai appris récemment le décès de Gilbert JONET suite à un accident de voiture. La gendarmerie suppose un malaise au volant. Il avait été membre du club de Mandeure, ensuite,  membre de notre club, à Montbéliard, avant de rejoindre la TPG à Besançon. Nous nous joignons à la douleur de la famille.

Amicalement. »

Jean-Louis

Depuis quelques années, en effet, Gilbert, nous rejoignait les samedis, ne rechignant pas à faire les soixante kilomètres qui séparaient son petit village de Vernois, au pied du Château de Belvoir, de Besançon, pour participer à nos tournois internes et au jeu par équipes. Son jeu d’attaque et rapide, aux sacrifices parfois inattendus, était souvent déstabilisant pour ses adversaires. Nous regretterons tous la présence discrète de cet ami de longue date.

RÉFLEXIONS SUR « GILBERT JONET »

  1. Je suis très attristé par le décès de Gilbert que j’ai croisé de longue date dans les rencontres d’échecs, déjà à l’époque du club de Mandeure qui a disparu depuis longtemps. Il me laissera l’image de quelqu’un d’aimable, gentil, discret, et très agréable partenaire ou adversaire d’échecs.

  2. J’ai toujours connu (sans vraiment le connaître) Gilbert. Je l’ai même déjà affronté lors de mes débuts en interclubs fin 80, début 90 quand il jouait à Mandeure.
    Paix à son âme !

  3. Quelle tristesse !
    Un Monsieur si sympathique, toujours souriant.
    C’est avec lui que j’ai joué ma plus courte partie jusqu’à présent : abandon au 4° coup dans le tournoi interne.

  4. Gentillesse et discrétion.
    Et, de manière plus anecdotique, le souvenir qu’il jouait plus vite que son ombre (mais sans en faire à personne). C’est pour ma part, ce que je retiendrai de Gilbert.

  5. Très attristée par cette nouvelle. J’ai joué contre Gilbert plusieurs fois, il fallait réussir à ne pas se laisser entraîner par son rythme de jeu…
    Je garderai le souvenir de la gentillesse d’un coéquipier très arrangeant, toujours partant.

  6. Nous garderons tous ce souvenir de Gilbert, le seul joueur sans doute au monde, à finir sa partie avec plus de temps à sa pendule qu’en débutant. Cette rapidité lui joua d’ailleurs quelques tours et je me souviens de cette petite anecdote peu flatteuse pour moi, car manquant un peu de fair-play. Nous sommes à Pontarlier, en 1998, au cours d’une ronde groupée de Nationale IV et Gilbert est encore au Roi Blanc. Nous sommes les derniers à jouer et, du résultat de notre partie, dépendra l’issue du match. Les joueurs se sont regroupés autour de notre échiquier, plutôt agacés de me voir traîner en longueur, car ma position est une poubelle avec ses deux pions de moins et je suis dans un zeitnot terrible, à quelques secondes de la chute du drapeau. Nous sommes encore au temps des pendules mécaniques. De son côté, Gilbert, a sans doute plus d’une heure à sa pendule et, à chaque coup, nous guettons la chute éminente de ce satané petit drapeau. D’ailleurs, Gilbert, malicieux, frappe sur la pendule avec la vigueur du forgeron sur son enclume pour le faire tomber. Et notre Gilbert, entraîné par mon zeitnot, joue encore plus vite que d’ordinaire !

    Gilbert mène les Noirs

    Mais j’ai repéré un mat des épaulettes possible en f8 et plante mon cavalier devant le nez de son pion en f6. Croyant à la boulette dans l’affolement du zeitnot, il le croque sans autre forme de procès ! À l’instant même où ma dame claque sur l’échiquier en f8, infligeant le mat au Roi noir, le drapeau tombe. Gilbert s’écrie victorieux :
    Tombé !
    Ma position était désastreuse, je tombe au temps, mais Gilbert à perdu. Le mat prime sur l’échiquier !
    C’en est trop pour notre émotif Gilbert qui se dresse d’un bond, quitte la salle et disparaît dans la nuit d’hiver, terriblement en colère contre lui-même et, sans doute, un peu contre moi, de lui avoir ainsi arnaqué la partie. Mon petit brin de mauvaise conscience est vite effacé par les bourrades amicales de mes coéquipiers à qui je viens d’offrir cette victoire inattendue.

    À un des ces jours, mon vieux Gilbert et j’espère que tu ne m’en veux pas trop…

  7. C’est avec une profonde tristesse que j’apprends la disparition de Gilbert. J’entretenais avec lui une relation d’écoute depuis fort longtemps et c’est je pense en partie pour cela qu’il a décidé de rejoindre notre club il y a quelques années. Gilbert était un passionné de notre jeu à n’en point douter. Il jouait beaucoup de parties et s’engageait dans de nombreux tournois chaque année.
    Il a représenté notre club dans de nombreuses compétitions par équipe également. Toujours disponible, c’était un équipier modèle, je peux en témoigner en tant que capitaine d’équipe et directeur technique.
    Son jeu atypique en a surpris plus d’un et il fallait toujours se méfier du rythme avec lequel il jouait…
    Gilbert était un homme discret avec une part de mystère. Avec le temps j’ai appris à apprécier sa compagnie et je garde le souvenir des matchs par équipe au cours desquels il s’est de nombreuses fois imposé.
    Paix à ton âme Gilbert et pense à préparer un échiquier pour quand viendra notre tour de te rejoindre!

    Jean-François Corsini

Anti-Virus Blitz vendredi 29 mai 20 h 45

Ce confinement de deux mois vous a sûrement bien gavé de samedi après-midi à la maison. Je vous propose donc une nouvel Anti-Virus blitz, le vendredi 29 à 20 h 45.

Je découvre qu’il est possible de réaliser des tournois Système Suisse sur lichess, mais qui malheureusement ne peuvent fonctionner que pour des parties rapides, car l’intervalle maximum entre deux rondes, ne peut être que de soixante minutes*. Je vous propose donc un nouvel Anti-Virus Blitz, 7 rondes de 10 minutes KO. Beaucoup plus facile à gérer, puisque la plate-forme s’occupe de tout. Le tournoi ne devrait pas durer guère plus de 2 h  30, si lichess gère les inter-rondes (1 mn entre chaque, cela laisse peu de temps pour souffler ou bien c’est nous nous qui décidons. Vous choisirez.

Clôture des inscriptions à 14 h 50. Il est préférable de le faire largement auparavant, car je devrai valider votre appartenance au groupe Tpg. Pour vous inscrire ou suivre le tournoi, un clic sur le logo lichess.

Attention ! Là encore des prérequis nécessaires (à ne pas lire en diagonale) :

  • une inscription sur lichess.org  ;
  • une inscription à la communauté Tour, Prends Garde ! sur lichess également. Inscrivez-vous rapidement (si ce n’est pas déjà fait) pour rejoindre le groupe Tour, Prends Garde en cliquant sur Rejoindre l’équipe.
  • Mais vous inscrire au groupe ne suffit pas, il faut aussi vous inscrire au tournoi en cliquant sur le logo.

La tournoi lancée, vous pourrez suivre les parties en cliquant sur le logo ci-dessus
(du moins je le crois).

* Depuis ma dernière connexion, ils ont amélioré le système et il est possible de programmer la date et l’heure de la ronde suivante. Par contre, impossible (pour l’instant) d’une plage de jours possibles comme pour nos tournois Geek.

UNE RÉFLEXION SUR « ANTI-VIRUS BLITZ VENDREDI 29 MAI 20 H 45 »

Benjamin est sans merci !

Quelques amis du club de Metz organisèrent, les 23 et 24 Mai, un marathon de blitz gratuit de 24 h, au profit de l’hôpital Mercy de Metz pour la lutte contre le COVID-19. Benjamin y participa et nous envoie ce joli coup tactique.

Les Noirs viennent de jouer Bf5. Que répondent les Blancs ?

Le Quiz

Jusqu’au milieu du XIIIe siècle, sur l’échiquier occidental, ne s’affrontent pas encore des pièces blanches et des pièces noires, comme c’est le cas dans le jeu d’échecs contemporain.

Quelles en étaient les couleurs  ?

Onze bonnes réponses !

« Elle ne fut pas étonnée le moins du monde de s’apercevoir que la Reine Rouge et la Reine Blanche étaient assises tout près d’elle, une de chaque côté. Elle aurait bien voulu leur demander comment elles étaient venues là, mais elle craignait que ce ne fût pas très poli. »

Lewis Carroll, À travers le miroir

Le choix des couples blanc-rouge et rouge-noir sont deux bonnes réponses. Blanc-rouge était peut-être plus précis, le rouge et le noir étant les couleurs venues d’Orient. Les deux systèmes de couleurs cohabitèrent sans doute pendant plusieurs siècles.

« Les Échecs, pour Kasparov, sont une jungle blanche et noire » et depuis fort longtemps, nous avançons, explorateurs intrépides ou timorés, sur ces chemins pavés de noirs  et de blancs, oublieux de ce temps où les pistes étaient à peine tracées. Venu d’Orient, l’échiquier n’était au bas Moyen Âge le plus souvent qu’une pièce de tissu monochrome, où de simples lignes délimitaient les soixante-quatre cases. C’est sous cette forme qu’il apparaît dans l’iconographie médiévale, en particulier dans le vitrail de la cathédrale Saint-Maurice de Tours (1255-1267), représentant la partie d’échecs des enfants de saint Eustache avec son échiquier de 4 x 5 cases, uniformément vert.

Hexagone 19, Légende de saint Eustache, Baie 214, Cathédrale saint-Gatien de Tours. Cliché  Jean-Yves Cordier (avec son aimable autorisation).

C’est dans les Vers d’Einsielden, le plus ancien texte occidental mentionnant les échecs (vers 990), que l’usage d’un échiquier bicolore rouge et blanc est évoqué. Sans doute, une innovation récente adoptée que par quelques joueurs seulement. Mais il est fort probable que, facilitant grandement le calcul des déplacements, cette pratique fut adoptée rapidement et se généralisa. Les représentations antérieures à 1200 confirment l’opposition rouge/blanc mise en évidence par Michel Pastoureau : « Jusqu’au milieu du XIIIe siècle, en effet, sur l’échiquier occidental ne s’affrontent pas encore des pièces blanches et des pièces noires, comme c’est le cas dans le jeu d’échecs contemporain, mais bien des pièces blanches et des pièces rouges. Cette opposition de couleurs n’était certes pas celle que l’Occident avait héritée de l’Islam. Dans le jeu indien puis musulman, s’affrontaient à l’origine — et s’affrontent encore aujourd’hui — un camp noir et un camp rouge, deux couleurs qui formaient un couple de contraires. Ici aussi, il a fallu repenser un aspect du jeu, et le repenser rapidement, car l’opposition du noir et du rouge, fortement signifiante aux Indes et en terre d’Islam, n’avait pour ainsi dire aucune signification dans la symbolique occidentale des couleurs. On transforma donc le camp noir en camp blanc, l’opposition du rouge et du blanc constituant pour la sensibilité chrétienne de l’époque féodale le couple de contraires le plus fort* ».

Codex Wilehalm de Wolfram von Eschenbach, 1334, University Library Kassel.

Ces enluminures illustrent l’évolution progressive des couleurs. Par rapport au modèle oriental, l’échiquier se colorise, mais les pièces gardent les couleurs (noir et rouge) des origines. Puis l’échiquier passe au noir et blanc et le camp noir devient blanc.

Cependant au blanc et rouge apparu aux environs de l’an mil, succéda progressivement, à partir du XIIIe siècle, l’opposition blanc/noir. « Car entre-temps, poursuit Michel Pastoureau, la couleur noire avait connu une promotion remarquable et, surtout, les théories d’Aristote sur la classification des couleurs s’étaient largement diffusées et faisaient du blanc et du noir deux pôles extrêmes de tous les systèmes. Vers le milieu du siècle suivant, sans avoir totalement disparu les pièces rouges étaient devenues rares : le jeu d’échecs était mûr pour entrer dans cet univers du noir et blanc qui caractérise la civilisation européenne à l’époque moderne* ».

Par ailleurs, l’usage de camps noir et blanc était traditionnel dans les jeux de plateau européens et particulièrement dans le nord avant même l’introduction des échecs, c’est donc naturellement que les couleurs orientales ont glissé vers notre noir et blanc.

Tractatus de ludo scacorum : Scacorum ludum ab Ulixe inuentum, entre 1400 et 1499 (Traité du jeu d’échecs – Le jeu d’échecs inventé par Ulysse), Biblioteca Digital Hispanica

« L’évolution vers l’actuel jeu en noir et blanc est sans doute moins linéaire que ne le proposait Michel Pastoureau, conclut Luc Bourgeois dans son article Les échecs médiévaux : jeu des élites, jeux de couleurs. Le contraste noir/blanc constitue une tradition ancienne pour les jeux de tables du nord de l’Europe, qui fut adaptée aux échecs après leur introduction dans ces régions. D’autre part, si le couple noir-blanc devint très majoritaire pour les échiquiers à partir du XIIIe siècle, le phénomène est moins prégnant pour les pièces, qui demeurent largement associées aux teintes traditionnelles — rouge et blanc/jaune — jusqu’à l’époque contemporaine », comme en témoignent, les premiers échiquiers Staunton victoriens et les reines rouge et blanche que notre jeune Alice craint de froisser. »

* L’échiquier de Charlemagne de Michel Pastoureau, 1990 – Editeur Adam Biro, Collection Un Sur Un